« H » de Franck Bouysse

1) trilogie ( 468 pg) lu en 24 H

Vous l’avez compris, je suis mordue. Franck Bouysse est devenu pour moi un incontournable. En vacances dans le Sud pour Noël, après avoir adoré «  Né d’aucune femme » et avoir beaucoup apprécié « les buveurs de vent », j’étais à « L’échappée belle » à Sète, librairie du centre-ville que je vous recommande chaudement si un jour vous visitez cette très jolie ville de bord de mer. J’ai demandé le rayon littérature et plus spécifiquement Bouysse, la libraire s’est enflammée en entendant son nom et m’a demandé lequel je souhaitais. Puis elle m’a recommandé « H ». Elle m’a expliqué qu’il était différent mais tout à fait passionnant. Je la remercie.

« H » paru le 4 novembre 2020, réunit sous un même titre trois romans formant une trilogie: « Le mystère H » sorti en 2008, « Lhondres ou les Ruelles sans étoiles » paru en 2010 et « La huitième Lettre » paru en 2012. Tous publiés chez Les Ardents Editeurs. Franck Bouysse a repris ses trois romans pour les réécrire, les a améliorer et les réunir sous en un même ouvrage publié chez Le Livre de Poche.

Cette trilogie est à part. On reconnaît le style de l’auteur mais il nous embarque dans un récit d’aventures entre sciences fiction et fresque de l’humanité. Ce livre ne ressemble en rien à ses précédents. Il oscille également entre roman policier et roman d’aventures. Un thriller haletant. Franck Bouysse embrasse plusieurs genre littéraires dans cette odyssée sombre et puissante.

« Les faits que je me propose de vous relater dans mon journal semblent si étranges et extravagants que ma plume paraît encore hésiter à la pression volontaire de mon bras. » p.9

LIVRE 1: « Journal de John W. »

Ou on on pourrait l’appeler « Le mystère H » . Le fameux journal nous tient en haleine dès les premières lignes. Nous sommes en 1907, son narrateur tient à préserver son anonymat. Nous ne connaissont donc que son prénom et son initail, John W. qui nous parle de son mystérieux compagnon de voyage « H ». Ils s’apprêtent tous deux à traverser l’océan à la recherche de l’expédition Lucas, disparue en mer en 1905. Une expédition dont nul ne connaissait l’objectif mais dont il pense que son ami a percé le secret. La traversée commence et rapidement, des évènements étranges apparaissent en mer ainsi que des obstacles à leur avancée. John s’interroge petit à petit sur l’honnêteté et la fiabilité de son ami puis ses doutes vis-à-vis de la démarche de H et de ses intentions vont augmenter au fur et à mesure des épreuves auxquelles lui et l’équipage doivent faire face.

« J’ai vu bien des cas exceptionnels lors de ma pratique de la médecine, mais le comportement des deux hommes fit voler en éclats tous mes repères, comme si l’expression de leur humanité avait désormais quitté leurs corps. L’un d’eux avait d’ailleurs cessé toute forme de communication et restait prostré des journées entières à sourire béatement. Le second sortit immédiatement de sa torpeur quand j’évoquai le nom de Lucas. » p.25

« Sir John Lucas était le descendant d’une des plus prestigieuses familles de la City. Grand aventurier, il passa sa vie à courir le monde, obnubilé par la recherche de civilisations disparues, fasciné par les vestiges retrouvés sur l’île de Pâques, dans la vallée du Nil et jusqu’au plus profond de la forêt amazonienne. Il se faisait fort d’élucider la disparition des peuples à l’origine de ces merveilles éparpillées de par le monde. Au fil des années, il parvint à réunir une impressionnante quantité de documents, qu’il se mit à étudier avec ferveur. Sans que nul n’en connaisse la véritable raison, il délaissa son sanctuaire de mémoire, afin de mettre sur pied une expédition. Les marins engagés furent immédiatement consignés à bord, avec interdiction de descendre à terre et de communiquer avec quiconque hors du bateau. Toute la presse de l’époque commenta largement ce dernier périple qui aurait dû couronner une vie déjà bien remplie. » p.15

LIVRE 2:« Les ruelles sans étoiles »

Un roman choral où les voix s’expriment à vingt ans d’intervalle (1888 , 1908). On y suit les pérégrinations de Jonas, orphelin, qui va tenter de faire son destin à travers le monde jusqu’à l’âge adulte. D’espoirs en désillusions. Son enfance est parsemée de rencontres (Mary l’écuyère, Mina Wentsworth, Mike Burnell, Oliver, Mickael, Jim, Maïa..) qui vont le forger et le conduire à son destin. On découvre aussi un personnage à peine croisé dans le premier tome de la trilogie, le docteur aliéniste, Walter Croft, qui traîne dans les bas-fonds de Londres, en arrière-plan des crimes de Jack l’éventreur et tombe amoureux d’une prostituée, Hannah et veux la sauver d’elle-même.

« Je me suis fait tatouer le bras […]des animaux improbables incrustés dans ma peau au milieu de rires d’hommes dont la vie se résume à deux états: le départ et le retour. Leur sang coule dans un sens, puis dans l’autre, leur cœur est un cap Horn. » p.133

P.141
p.141

Mycroft souffre. Hannah refuse de croire qu’il veut l’arracher à sa misère et à sa condition. Il l’aime vraiment. Il se voit comme un chevalier.

p.228

Un livre fort, captivant, intriguant comme le premier mais dans un genre encore différent. J’ai beaucoup aimé là encore. On est surpris et notre curiosité est sans cesse piquée de toute part. Hannah acceptera-elle de faire confiance? Les recherches du médecin mèneront-elles quelque part? Que deviendra Jonas? Chaque fois, il semble avoir trouvé un répit et un foyer accueillant mais un nouvel obstacle apparaît. Notre esprit est éveillé et tenu en haleine de toutes parts. Et jack l’éventreur, qui est-ce? Nos amis l’arrêteront-ils ou le croiseront-ils? Pourquoi l’auteur en parlerait-il sinon?

LIVRE 3:« La huitième lettre »

Ce dernier regroupe des récits sur l’humanité narrés par un personnage essentiel au roman mais je ne peux vous en expliquer la cause sans trop vous en dévoiler. D’autres l’ont fait et je trouve ça fort dommage. C’est là que réside justement l’intérêt du livre. Je vous laisse le découvrir. C’est original et j’ai apprécié le point de vue de l’auteur.

 » – La sagesse ne consiste pas à remettre en cause ce que nous ne comprenons pas« . p376

« Je m’en dirai aux hommes de combattre leurs dieux et que de leurs âpres batailles naitront des enfants désirés. […] les hommes ne pensent qu’à transmettre leur propre humanité, et à transcender, en érigeant des monuments ou en fabriquant des objets. Leur manière d’arrêter le temps. la seule.  » p.456

Le lecteur a droit également à une description sans fards de la forêt amazonienne. Un exotisme pouvant décourager les plus téméraires. Elle est décrite comme un « Simulacre de paradis » avec sa jungle aux « pluies diluviennes », « grouillant de mille vies » (p.299). Ses insectes comme la Tocandira, fourmi venimeuse, l’abeille à sueur, la mouche des sables dont la piqûre conduit au supplice, la punaise assassine ou encore le moustique vecteur de malaria, dengue, éléphantiasis ou fièvre jaune ainsi que ses animaux féroces tel que le caïman aux mâchoires terrifiantes, l’anaconda aux anneaux surpuissant capables de broyer le corps d’un cheval, la puraque, une anguille assommant sa proie à coup de décharges électriques… Les pages 299-300 n’invitent pas au voyage.

P.299
P.300
La puraque
La Tocandira
L’abeille à sueur

« Là où l’homme est un fantôme oublié de l’humanité »

p.300

Ces récits vont vous faire voyager à travers le monde et l’Histoire. De l’Antarctique à l’Amazonie en passant par le Nil avec ses pyramides et l’Ile de Pâques. Les mythes ancestraux et les croyances des peuples des différentes civilisations sont évoqués sous forme de contes. Antonin Lascombe, Celia Lucas, Hoa Tenga, Julius brown, Aïuk, Huutlan, Héphaïstos, Néhti peuplent ces récits poignants au fil du temps et aux quatre coins du globe. Une odyssée humaine vivante et palpitante. Des femmes et des hommes courageux et dotés de foi. En parallèle, Mary Manstor et Jonas s’organisent pour une opération secrète. On n’en rate pas une miette.

Bouysse est aussi à l’aise dans le fantastique que dans le roman noir. Ici, il allie différents genres et en fait un multi genres réussi, captivant et riche, sombre et lumineux. La chute est juste parfaite. Si vous aimez le mystère, l’aventure et l’intrigue, n’hésitez pas et embarquez pour une aventure peu commune. Voyage & aventure garantis! Vous serez surpris et conquis.

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